Remplacement médical insolite sur l’île de Sein

Le témoignage pour Swing du Dr Pino, médecin généraliste.

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Avez-vous déjà entendu parler de cet homme devenu médecin à 67 ans ? Si ce n’est pas le cas, nous vous présentons le Dr Pino, avec qui nous avons eu le plaisir de partager une interview passionnante.

Devenu tardivement médecin généraliste, il exerce 6 mois de l’année sur une petite île du Finistère : l’île de Sein.

À l’image de son parcours atypique, c’est son mode d’exercice plutôt insolite qui a capté notre attention.

Également à la recherche d’un ou de plusieurs remplaçants réguliers, il a accepté de revenir sur son histoire mais surtout, de nous raconter les conditions de sa pratique sur cette île bretonne de moins de 300 habitants.

Réaliser son rêve : devenir médecin

Comme nous l’annoncions ci-dessus, le Dr Pino a eu un parcours universitaire peu commun. Passionné par la médecine, son chemin de vie ne l’a emmené que tard vers sa vocation.

Nous lui avons demandé de le résumer en quelques phrases :

« J’ai commencé médecine quand j’étais jeune à l’âge normal […]. J’ai fait médecine pendant 6 ans et je me suis arrêté. J’ai repris médecine à 56 ans. Entre-temps, j’ai travaillé dans le numérique, internet, la communication. […] Pas du tout en médecine, mais toujours avec l’idée sous-jacente de pouvoir reprendre un jour. » 

Mais comment a-t-il réussi à trouver la force et la motivation pour reprendre ses études ? Voici sa réponse franche :

« Je m’emmerdais quand même sacrément dans ma vie. Je voulais faire médecine quand j’étais petit et j’ai dû m’arrêter pour des questions plutôt économiques qu’autre chose, en 6^ème année. J’ai fait une activité qui était intéressante puisque c’était le début de ce que vous connaissez qui se mettait en place dans les années 80. Autant j’aime beaucoup mettre en place de nouvelles choses, autant être chef d’entreprise ce n’est pas mon truc. Par contre, nous avions 4 enfants et les laisser avec madame pour faire le beau à la Fac pour faire un internat, c’était un peu difficile. »

Puis un jour, les enfants ont grandi et soutenu par sa femme et sa famille, le Dr Pino prépare sa rentrée en médecine. Une période difficile puisqu’il a dû se couper de sa vie familiale, l’université étant à plus de 100 km de son domicile. Mais avec le soutien infaillible de ses proches, il réalise son rêve et devient docteur.

Désormais à la retraite de son ancien travail, cette 2^e carrière lui permet de faire ce qu’il n’a « pas encore eu le temps de faire ».

Il est prêt à exercer encore 10 ans ou plus, tant que son corps le lui permettra.

L’île de Sein

Située dans le Sud-Est de la mer Celtique à 7 km des côtes bretonnes, l’île de Sein est reliée par un trajet maritime de 50 minutes au continent. Pourtant, la rotation en bateau se fait seulement 1 fois par jour en dehors des périodes estivales et des vacances scolaires.

Mais la plus grande particularité de cette île, c’est qu’il n’y a pas de voiture. Avec une superficie de seulement 0,56 km² , l’utilisation de véhicules n’y est pas indispensable.

Les conditions de travail sur l’île de Sein

Dans un second temps, nous nous sommes intéressés plus précisément aux conditions dans lesquelles exerce le Dr Pino sur cette petite île.

Là encore, la surprise fut de taille. 

Entre médecine de village, médecine préventive et urgences

« Sein, c’est très particulier. D’une part, il y a une population qui n’est pas en grand nombre et qui est chronique. Ce n’est pas intéressant au niveau médical, sauf que si on veut un petit peu creuser, au milieu de tous ces gens qui prennent des traitements pour de l’hypertension, etc., il y a des choses aigues qui existent, des traitements de la douleur. Il y a des choses à faire. Et c’est très intéressant parce qu’on a le temps de les creuser, et on a également du temps pour s’intéresser à d’autres choses.

On a un rôle qui n’est pas uniquement médecin prescripteur mais aussi de suivi régulier, répondre à des questions, etc.

Puis il y a les touristes, qui viennent en période estivale avec des entorses, des sutures…

Et il y a le suivi des urgences. Toute la population peut avoir à un moment donné quelque chose d’aigu
(AVC, arrêt cardiaque, …). À ce moment-là, nous sommes en charge de faire les premières interventions et de mobiliser un hélicoptère ou un bateau pour envoyer le patient sur le continent à l’hôpital. »

Les Sénans

Tout au long de cette conversation, nous avons ressenti l’attachement particulier que porte le Dr Pino aux habitants de l’île, les Sénans. Il les soigne au quotidien et nous en apprend un peu plus sur les conditions de leur prise en charge médicale.

« C’est une population qui peut vieillir sur place. [Même s’il n’y a pas de voitures]. Même des personnes à mobilité réduite sont prises en charge. Elles bénéficient d’une aide-soignante qui s’occupe d’elles du lundi au vendredi. Elle vient pendant une semaine et ensuite, elle est remplacée par une autre aide-soignante. Elles logent sur l’île pendant la semaine. Toutes deux s’occupent aussi bien de la distribution de médicaments, que des soins d’hygiène et du confort. On suit ces gens-là comme à l’EHPAD, mais chez eux. On essaie de leur trouver du confort.

Par exemple, en septembre, je vais récupérer un fauteuil électrique que quelqu’un du continent veut nous donner. Ça permettra à des personnes à mobilité limitée de pouvoir aller au phare, alors que ça fait un ou deux ans qu’ils n’y sont pas allés. C’est pour ça que nous devons chercher un véhicule mais aussi parce qu’il n’y a pas beaucoup de moyens financiers.

On est immergé dans un monde qui est un peu différent. C’est une autre façon de voir les choses et ça permet d’avoir un regard un peu différent sur la médecine. Clairement, ce n’est pas le cabinet. Là on prend un peu plus de temps, et s’il y a autre chose à faire c’est nous qui les faisons. Par exemple, les saignées c’est nous qui les faisons. S’il y a une chimiothérapie, on la fait aussi. »

Les soignants de l’île de Sein

Les seuls soignants sur place sont les aides-soignantes et les deux médecins généralistes. En effet, le Dr Pino partage le cabinet médical avec sa consœur, Laetitia. C’est d’ailleurs elle qui l’a accueilli en stage durant ses études. Depuis, il est revenu pour faire des remplacements, puis finalement, pris d’affection pour ces lieux, il choisit de s’associer à elle pour lui permettre de revenir sur le continent plus régulièrement. Ils se répartissent alors l’activité sur Sein en alternance, un mois sur deux.

Chacun leur tour, ils doivent gérer toutes les situations possibles. « L’urgence, on la fait. » S’il faut faire des points de suture, ils les font. Il raconte ainsi qu’il arrive parfois de devoir identifier le niveau d’urgence d’une situation pour savoir s’il est nécessaire de faire intervenir un bateau ou un hélicoptère, « C’est de la médecine de décision ». 

Les recours aux moyens externes (radios, échographies, etc.) sont temporisés. Si un patient a besoin d’une radio et que cela peut attendre, une organisation est mise en place pour qu’il puisse se rendre sur le continent les jours qui suivent, sans faire déplacer un transport spécialement pour lui. À l’inverse, s’il faut un médicament du continent dans l’urgence, ils procèdent immédiatement à une évacuation.

Quant à la pharmacie, elle est gérée par leur cabinet. Ils passent les commandes, s’occupent des stocks et délivrent les médicaments. Toute la gestion des médicaments est réalisée par le docteur et sa consœur. Mais cela devrait changer d’ici peu, avec un nouveau logiciel métier et l’intervention d’un pharmacien qui pourra gérer la paperasse et la gestion de réapprovisionnement du stock. Un vrai soulagement pour eux.

Et en tant qu’uniques médecins, ils peuvent également intervenir sur les animaux si besoin « On devient vétérinaire aussi s’il faut s’occuper d’un chien ».

Les remplacements sur l’île de Sein

Petite île paisible cherche remplaçant.

Le rythme de travail

Le Dr Pino travaille à un rythme d’un mois sur deux sur l’île. Chaque mois où il exerce à Sein, il fait du 24h/24, 7j/7. Il a son téléphone professionnel sur lequel les habitants peuvent le contacter pour prendre les rendez-vous, ou à n’importe quelle heure de la nuit pour les urgences.

Un appartement de 60m² au-dessus du cabinet est dédié aux médecins, avec salon, cuisine, salle de bain, 2 chambres, une vue mer et toutes les commodités nécessaires (sèche-linge, lave-linge…).

Une journée type

« La journée théorique c’est d’aller au bateau à son arrivée le matin à 10h30, récupérer les médicaments. Le bateau c’est l’agora, c’est la place où l’on parle. L’endroit où on salue tout le monde et où tout le monde vient. On prend des nouvelles. C’est là qu’on peut aussi remplir son carnet de rendez-vous. On peut faire une consultation avant le bateau, et une ou deux après jusqu’à 12h, 12h30. Les gens appellent directement le cabinet pour les rendez-vous, il n’y a pas de secrétariat. Ça sonne sur le portable. »

Les consultations se déroulent par exemple de 10h à 16h mais le cabinet est ouvert en continu. Cela permet à chacun d’organiser ses rendez-vous comme il le souhaite.

Une fois par semaine, le médecin présent prépare le pilulier pour tous les habitants suivis par l’aide-soignante. Ils profitent de ce moment pour faire un débrief sur l’état de santé et la situation de chacun. Sa consœur réalise aussi plusieurs visites à domicile au cours de la journée, en revanche « moi je n’en fais pas beaucoup », précise le Dr Pino. Sur l’île de Sein, le médecin choisit son mode d’exercice.

Avec des demandes de consultation allant de 2 à 6 par jour, ils ont la possibilité de prendre le temps avec chaque patient et de prodiguer des soins de qualité.

Par habitude, les patients appellent toujours avant de venir pour savoir quand ils peuvent consulter et planifient les rendez-vous. Ces derniers peuvent également être immédiats.

En dehors de ses horaires, le Dr Pino fait de la téléconsultation, une autre pratique qu’il apprécie car cela lui permet de varier ses missions, mais aussi ses revenus.

La recherche de remplacement

A partir du 1^er octobre, la consœur du Dr Pino part à la retraite. Leur cabinet est actuellement à la recherche d’un ou plusieurs remplaçants qui pourront venir assurer la continuité des soins 1 mois sur 2, toujours en alternance avec le Dr PINO.

Cela peut également être une activité fixe pour combler le mois sans médecin.

L’appartement au-dessus du cabinet évoqué précédemment est mis à la disposition de chaque médecin qui vient assurer la permanence.

D’autres avantages, notamment financiers comme la PDSA ou encore un taux de rétrocession élevé garantissent au remplaçant une rémunération honnête. À cela s’ajoutent des facteurs non-négligeables comme exercer dans un cadre exceptionnel avec un rythme de travail agréable.

Nous avons demandé au Dr Pino ce qu’il dirait pour attirer un remplaçant à venir pratiquer la médecine sur l’île : « Il peut profiter de ce moment-là pour régler tous les problèmes qu’il n’a pas réglé indépendamment du travail.

Pour un interne, c’est le moment de faire ses fiches pour sa pratique dans sa vie.

Je ne dirais pas qu’il y aura une activité débordante, mais une activité curieuse. Pour un remplaçant, c’est un moment de calme qui permet de faire le point avec des gens et qui permet de se poser des questions. »

Se faire soigner à Sein pour bénéficier de soins de qualité

Il y a également des personnes qui connaissent l’île de Sein et qui profitent de leur séjour pour venir faire un bilan médical car ils n’ont aucun médecin disponible chez eux.

Le docteur raconte : « Par exemple, j’ai quelqu’un qui vient parce qu’il passe 6 mois de l’année sur l’île. Il est atteint d’une maladie chronique, dès qu’il arrive, il m’appelle. […] On regarde comment ça évolue. Il me demande ce que je peux proposer. […] Pendant le mois on essaie 3 pistes. […] Et là, le 3^ème traitement marche. Et je pars avec le sentiment du devoir accompli parce que la personne remarche alors qu’elle a une maladie chronique. Il y a plein de petites anecdotes comme ça qui font du bien. »

Le Dr Pino insiste sur la qualité des soins qu’il peut donner grâce au temps qu’il a pour le faire.

Venez remplacer sur l’île de Sein

En conclusion, l’île de Sein est un lieu insolite où la médecine prend un autre sens. Le Dr Pino et sa consœur se répartissent la permanence et la continuité des soins entre les mois pairs et impairs. Ils ont opté pour un rythme différent et peuvent se permettre de pratiquer des soins de qualité.

Les consultations ne sont pas abondantes mais elles ont aussi leur lot de surprises.

Différents aspects de la médecine y sont pratiqués, comme le domicile, la gestion des urgences, le suivi régulier ou encore la gestion des médicaments.

Si vous êtes remplaçant et que vous cherchez un endroit pour vous ressourcer tout en étant rémunéré, l’île de Sein semble être un lieu idyllique !