Chez Swing, on ne s’intéresse pas qu’au remplacement médical. On aime aussi apprendre de nouvelles choses en lien avec la santé et les partager avec vous !
Pour ce faire, nous avons créé une série vidéo « L’œil de l’expert ».
Le principe est simple : le Dr Damien Pasquier, président de Swing, interviewe des experts dans le domaine de la santé et explore de nombreux sujets utiles aux professionnels de santé.
Lorsque nous avons rencontré Philippe Smolders, fondateur de Conecsio, il nous a paru évident que nous devions partager un moment avec lui pour parler des données de santé, de leurs enjeux et perspectives.
Dans ce premier épisode, nous parlons de consentement du patient, d’essais cliniques, de liens avec la recherche, du contexte réglementaire et du stockage de ces données de santé, si précieuses pour la médecine et en constante augmentation.
Conecsio, une Medtech spécialisée dans la sécurisation de la recherche médicale
DP : « Est-ce que tu pourrais te présenter ? Que fais-tu dans la vie ? »
PS : « Je m’appelle Philippe, j’ai 50 ans, je suis ingénieur de formation. J’ai toujours travaillé dans la tech. Pendant un peu plus de 20 ans dans l’industrie de la finance de marché, où j’ai monté des entreprises de logiciels ou de services, de consulting pour les acteurs de la finance de marché.
Depuis quelques années, j’accompagne des startups sur des sujets de positionnement, produit, marché, structuration opérationnelle, levées de fonds, etc.
Depuis un an, je me suis moi-même relancé, j’ai replongé dans l’entrepreneuriat et j’ai monté Conecsio, qui est une Medtech dédiée à l’accélération et la sécurisation de la recherche médicale. »
DP : « Quand on parle de données médicales c’est assez vaste, quel est l’objectif de ta boîte ? »
PS : « L’un des trésors de la recherche médicale, c’est la donnée de santé. Plus on a de données, plus on peut aller vite et plus on peut aller loin dans la recherche, dans les analyses. On collecte en permanence de la donnée.
Le sujet, c’est l’utilisation de cette donnée. Que ce soit l’utilisation primaire, c’est-à-dire « je collecte une donnée pour un usage qui est déclaré », ou que ce soit une utilisation secondaire, c’est-à-dire « je réutilise une donnée qui avait été collectée par le passé et qui m’intéresse aujourd’hui. » Les usages de ces données sont nécessairement en lien avec une conformité, avec un consentement, sinon une non-opposition de leur usage ou de leur réusage par le patient.
C’est le service qu’on rend aujourd’hui aux acteurs de la recherche, de leur garantir le suivi et la gestion de la conformité de l’usage des données de santé. »
Collecter des données de santé
DP : « Par exemple, je travaille dans la recherche à l’hôpital et on a déjà fait une première étude sur le diabète.
[…] Finalement, on va s’apercevoir que dans ces données, on peut s’en servir pour aller s’intéresser à tout à fait autre chose, quelque chose qui n’a pas été initialement prévu dans cette recherche. Ça fait appel, plutôt non pas forcément à un consentement, mais à une non-opposition.
Dans ce cas-là, tu es là pour t’assurer que cette deuxième étude soit en conformité avec le souhait du patient concernant la gestion de ces données ? »
PS : « C’est ça. On ne va pas rentrer dans les détails techniques réglementaires, mais en gros, il faut le consentement du patient, sauf si la recherche est d’intérêt public, là où il nous faut juste une non-opposition. Je caricature un petit peu, je vais très vite là-dessus et les puristes m’en voudront sans doute. Mais il y a effectivement beaucoup de sérendipité dans la recherche.
Tu as des molécules qui sont découvertes et appliquées pour traiter une pathologie et qui faisaient l’objet d’une recherche pour une autre pathologie. Tu as aujourd’hui une molécule qui est très connue, qui était évaluée dans le cadre de la lutte contre le diabète, et qui est aujourd’hui utilisée pour les gens qui sont en surpoids et qui ont besoin de suivre un régime pour perdre du poids. C’est un exemple, il y en a d’autres.
L’autre cas d’usage dans lequel on peut avoir besoin, soit de retravailler la donnée, soit de l’enrichir, c’est dans le cadre de maladies qui peuvent mettre plusieurs années à apparaître. Par exemple, s’il y a une maladie qui met 10 ans à apparaître. On aura envie d’aller analyser les données des patients malades et de leurs proches d’il y a 10 ans, et de voir quel était leur mode de vie, qu’est-ce qu’ils consommaient, quelles étaient leurs pathologies, quel était leur parcours de soins, etc. C’est un autre exemple simple de besoin de réutilisation de données médicales. »
Conecsio pour apporter des bénéfices au collectif
DP : « Qu’est-ce qui t’a ramené vers la santé ? »
PS : « Quand on m’a évoqué ce sujet-là, le sujet qui nous a amené à Conecsio, je me suis dit, chouette, je vais travailler pour le bien commun. Alors, pas qu’on ne l’a pas dans la finance, parce qu’on a aussi besoin de financer nos projets, les infrastructures, les hôpitaux, les écoles, etc., et il faut des circuits financiers. Mais là, je me suis dit, tu vas travailler sur un sujet qui touche au quotidien des gens et à ce qui est le plus précieux pour eux, à savoir leur santé. Donc, ça permettait de remonter la chaîne de valeur du bien commun et de l’usage, je dirais, au bénéfice du collectif. »
DP : « Puisqu’on parle d’innovation, qu’est-ce qui t’inspire ? »
PS : « Il se passe beaucoup de choses en ce moment. On a connu la blockchain, le Big Data, l’intelligence artificielle, il y a énormément de choses qui se passent. Il y a le quantique qui arrive très vite également. Donc, je pense qu’on vit une véritable révolution numérique. C’est une révolution industrielle, mais en un temps concentré. Le temps s’accélère très, très fort. Je pense qu’on mesurera dans quelques années l’impact de ce qu’on est en train de vivre, les yeux grands ouverts. On vit quelque chose d’assez incroyable, je pense, en ce moment. »
La gestion de la donnée de santé
DP : « Comment s’intègre cette gestion des données dans la santé de demain ? »
PS : « Aujourd’hui, il y a énormément de progrès qui sont faits sur tous les fronts, sur toutes les thématiques dans la santé. Que ce soient les robots, que ce soient les protocoles, que ce soient les molécules, je pense que ce après quoi on court et ce vers quoi on va, c’est une personnalisation de la santé. C’est-à-dire que pour une même pathologie, toi et moi, on ne prendra pas forcément une molécule avec le même dosage, voire peut-être même pas forcément la même molécule. Donc, il y a un vrai enjeu à personnaliser la médecine en fonction de notre métabolisme, de notre personne, de qui on est, de notre histoire, de notre vécu. »
DP : « Et pour l’instant, on n’a pas forcément le moyen de monitorer tout ça. C’est vrai que si on arrive demain à pouvoir gérer individuellement tous ces patients-là, leurs traitements, c’est très intéressant. »
PS : « Oui, et une prise en charge passera d’abord par la prise d’information relative aux patients avant de pouvoir lui administrer un protocole, un soin bien sûr. Et donc forcément, ça veut dire qu’il va falloir récupérer les données de santé de chaque patient et finalement, comment on va gérer ces données de patients. »
En France
DP : « À l’heure actuelle, en France, comment ça se passe ?»
PS : « Alors là, on n’est pas tous égaux devant la réglementation au sujet des données de santé. En France, on a la chance d’avoir une réglementation très protectrice du patient, de sa privacy, de ses données de santé. Alors si on fait le grand écart, il faut traverser l’Atlantique où effectivement, le tabou est un petit peu moins fort sur le fait de vendre sa donnée de santé, ça se fait beaucoup plus facilement. Même en Europe, la France est le bon élève de la protection du patient et des données de santé. Souvent, quand on discute avec l’écosystème de la santé, ce qu’on entend, c’est que finalement, ce qu’on arrive à faire en France, dans le respect de la réglementation, on peut le faire à peu près partout ailleurs. »
En Europe
DP : « Il va y avoir une loi au niveau européen qui va régir toutes les données de santé dans les pays européens et donc la France.
Comment ça va se mettre en pratique ? Quelles vont être les implications par rapport à nos propres règles à nous ? »
PS : « Oui, effectivement, tu fais référence, je pense, à l’espace européen de la donnée de santé, qui est une réglementation européenne qui arrive fin 2024 […]. Alors c’est une loi qui est très complète et qui va régir tout le cycle de la recherche, de la collecte de la donnée pour son usage primaire, à sa réutilisation avec les infrastructures.
Enfin, ça définit vraiment les règles du jeu sur l’ensemble du sujet. J’ai envie de souligner trois points.
- Le premier, c’est que cet EEDS, l’Espace Européen de la Donnée de Santé, va rappeler, redéfinir, en tout cas, donner à tous des règles autour, encore une fois, des données de santé, des droits des patients et de la privacy à assurer autour de ces données de santé. Et ce qui est intéressant, c’est qu’on aura les mêmes règles pour tous en Europe. Ce qui sera nouveau.
- Deuxième point qui me semble intéressant, c’est que les producteurs de données, en tout cas ceux qui seront en mesure de produire des données de santé dans des volumes importants, seront contraints de partager ces données de santé avec les opérateurs de recherche qui leur en feront la demande. Donc imagine un laboratoire en Estonie qui demande à tous les CHU de France de produire un certain type de données. C’est une petite révolution qu’il va falloir organiser en termes d’interopérabilité, de process, d’outils, évidemment au bénéfice de la recherche, mais c’est quand même très structurant comme évolution.
- Et le troisième point qui est intéressant, c’est que cette réglementation va définir les règles de redevance autour de ce partage de données. Et ça c’est fondamental parce que, je n’ai pas parlé de tabou, mais c’est vrai que valoriser la donnée de santé, la monétiser, c’est un sujet qui ne s’aborde d’ailleurs pas forcément de cette manière-là dans l’industrie de la santé. Là les règles étant établies, elles permettront de maintenir les entrepôts de données de santé qui sont construits. On a construit et on construit encore beaucoup d’EDS, entrepôt de données de santé en France, mais il faut les maintenir. Et ça passe par la valorisation des données qui sont collectées et partagées. »
Ce qui va changer
DP : « Ces données vont être récupérées auprès des patients et elles seront entreposées dans des entrepôts européens, qui sont partagés entre tous les pays de l’Union européenne.
Pour faire avancer la recherche, si quelqu’un en fait la demande et que c’est conforme à la réglementation, il va pouvoir avoir accès à ces données. Et potentiellement en échange, il pourrait y avoir une monétisation, pour permettre justement l’entretien de tous ces lieux de stockage et ces serveurs.
Pour l’instant, c’est vrai qu’on a les données issues de la recherche, les données des parcours de soins dans les hôpitaux, les cliniques, etc. Mais il y a beaucoup d’objets connectés qui commencent à arriver sur le marché. Comment ça va se passer avec tous ces objets ? »
PS : « Petite précision, chaque producteur de données va garder son propre entrepôt de données de santé. Ça ne va pas être un entrepôt partagé, chacun a le sien. Par contre, on va avoir en France, par exemple, un guichet unique. Il va permettre à un acteur de la recherche à l’étranger de contacter ce guichet unique pour voir quel acteur français peut fournir telle ou telle donnée.
Après, ce que tu dis est très juste. La donnée de santé pour la recherche est issue des essais cliniques à proprement parler. Pour donner un ordre de grandeur, en 2021, on avait 13 000 essais cliniques en Europe qui ont concerné 2,5 millions de patients. Donc c’est quand même très volumineux. Ensuite, tu as les parcours de soins, tu peux être admis dans un CHU pour un sujet en particulier, ton dossier patient peut être source d’information pour la recherche. De plus en plus de sources d’information viennent alimenter ces entrepôts de données. On a effectivement les dispositifs médicaux et les objets connectés.
On doit être nombreux à avoir des Apple Watch et à avoir validé un consentement qu’on n’a pas vraiment lu et renvoyer nos données de santé aux États-Unis. Le volume des données de santé va littéralement exploser dans les années à venir. Je te donne un autre chiffre. En 2021, on estimait que dans le monde, on a créé 2 300 exaoctets de données de santé. Donc 2 300 exaoctets, c’est 23 00 fois 10 puissance 18 pour les matheux. En 2023, on était déjà à 3 000 exaoctets. Il y a une courbe d’accélération qui est très forte. Alors que des dispositifs médicaux arrivent, aujourd’hui, avec un smartphone, on peut se filmer et récupérer plusieurs constantes de données de santé, le pouls, la tension, etc.
Il y a des technologies qui te permettent de le faire avec la voix. Ce qui veut dire que globalement, on va vraiment vers une société dans laquelle, je vais caricaturer, mais tout objet va te permettre d’aller te donner une information sur ta santé. Si cette information-là, on arrive à l’agréger, à la structurer, à la croiser, on a une mine d’informations qui est absolument énorme.
En 2021, les 2 300 exaoctets représentaient un tiers des données créées dans le monde. Personnellement, je pense que cette proportion va augmenter. Ça représente plus d’un tiers et peut-être la moitié dans quelques années. Et pour autant, seulement 1% des données de santé est réutilisable pour la recherche médicale. À ça, il y a plusieurs raisons :
- La donnée peut ne pas être structurée. Mais les outils aujourd’hui te permettent de le résoudre de manière de plus en plus fluide. C’est plus vraiment l’enjeu, c’est plus vraiment le barrage.
- Les données peuvent ne pas être visibles. Il appartient aux acteurs qui collectent ces données de les rendre visibles dans le respect de la réglementation. Et c’est ce que sont en train de faire pas mal d’acteurs. On compte beaucoup d’acteurs d’IOT, par exemple, qui sont en train de monter des entrepôts de données de santé. Ce n’est pas forcément intuitif à la base.
- Et le troisième point, c’est la réglementation qui ne permet pas d’utiliser la donnée comme ça librement. Encore une fois, c’est une donnée qui est extrêmement sensible. Donc, l’enjeu au-delà de la visibilité, de la collecte, je dirais technique de la donnée, c’est la réglementation. »
DP : « Demain, ma montre peut me collecter des informations sur ma santé ? »
PS : « Ta montre demain, va te dire, si tu as du diabète ou si tu as de l’hypertension, etc. Donc c’est sûr qu’on voit tout de suite l’intérêt et le positif, que ça peut avoir sur toi. Mais aussi un petit peu le danger. C’est un peu l’histoire de la boîte de Pandore. C’est-à-dire qu’on va ouvrir tout un tas de choses et on ne sait pas forcément trop ce que ça peut vouloir dire derrière. Donc, quand tu parles de réglementation, je pense que c’est vraiment un point essentiel. »
Le passeport des consentements du patient
DP : « Une fois que la donnée a été collectée, pour savoir si le patient a donné son accord pour qu’elle soit utilisée, comment ça se passe ? »
PS : « Nous, ce qu’on met à disposition du patient, c’est un passeport des consentements dans lequel il va pouvoir déjà signer, de manière électronique, son consentement, à une étude clinique à laquelle il participera. Dans laquelle les acteurs de la recherche, les promoteurs de santé, comme on les appelle, les labos, les big pharma, etc., pourront aussi potentiellement remonter des informations vers le patient. Ils pourront lui dire « vous avez contribué à tel essai clinique, ça a permis de faire tel progrès, de tirer tel bénéfice ».
Ces deux points sont très importants, parce qu’aujourd’hui, ce qui est fondamental pour recruter les patients, pour l’inclusion dans les cohortes ça va être d’offrir aux patients la sécurité et la fierté de participer à l’essai clinique. C’est vraiment fondamental. C’est pour ça qu’on croit beaucoup à ça.
Ce passeport des consentements, on l’enrichit d’outils pédagogiques pour permettre aux patients de comprendre ce à quoi ils s’engagent. Sur le parcours de soins par exemple, il y aura des vidéos qui vont lui expliquer le geste chirurgical. Sur la recherche médicale, on a mis en place le bot conversationnel qui permet aux patients de poser des questions. Il appelle un numéro, il pose des questions sur la notice relative à la recherche clinique à laquelle il participe.
Une notice d’un essai clinique, ça fait dix, quinze, vingt, trente pages, c’est assez difficile à comprendre. Et même quand on maîtrise le langage technique, sincèrement, c’est assez difficile à comprendre. Quand le patient le signe, même s’il a le médecin investigateur à côté de lui pour répondre à ses questions, il est dans un contexte qui est un peu anxiogène, il rentre chez lui et il se dit « à quoi je me suis engagé ? ». Il appelle ce numéro de téléphone, il peut lui poser des questions, combien de temps ça dure, quels sont les effets secondaires, comment sortir du protocole, etc.
Et via ce passeport d’une certaine manière, on remet le patient au centre du sujet. Parce qu’il ne faut pas l’oublier, c’est lui qui est au centre du sujet. C’est sa donnée qu’on va travailler, c’est pour lui qu’on travaille, mais c’est grâce à lui qu’on travaille aussi. C’est comme ça qu’on a conçu le sujet par rapport au patient.
Après, par rapport aux promoteurs de santé, à proprement parler, il y a les CRO, qui sont les opérateurs qui mènent les essais cliniques pour les promoteurs de santé. Eux, ça va être des solutions de digitalisation de consentement, de suivi, de recueil de consentement, etc. Le promoteur de santé, qui va vouloir être dans la réutilisation de la donnée, va pouvoir tracer l’usage précis qui est fait de chacune de ces données. De sorte à gérer sa relation de conformité mais aussi sa relation contractuelle, redevance, avec les différents producteurs de données qui lui mettront à disposition. »
Les enjeux de la donnée de santé
DP : « Quels sont les enjeux vis-à-vis de la gestion des données de santé dans le futur ? »
PS : « Je crois qu’on a une très belle opportunité à saisir, un volume de données de santé qu’on va pouvoir collecter qui explose, et ça ne va pas ralentir. Il y a une très belle opportunité de contribuer à la recherche médicale et de la faire encore accélérer de manière significative. Si on ne veut pas rater ce virage-là, ça doit se faire dans le respect de la réglementation, dans le respect du patient, dans le respect des choix du patient quant au partage de sa donnée. Et si on réussit ce pari-là, pas très drôle quand on parle de réglementation, mais malgré tout, si on fait les choses proprement et de manière structurée dès le départ, on a un potentiel bénéfice derrière. Je pense qu’on ne le mesure pas encore.
Récemment, j’ai été accueilli par le CHU de Montpellier pour un petit souci de santé que j’ai eu, donc j’étais aux urgences, et dans la discussion, le médecin me dit, « qu’est-ce que vous faites dans la vie ? »J’explique ce que fait Conecsio, qu’on est sur la réglementation . « Ah mais c’est vous qui nous cassez les pieds, c’est vous qui nous empêchez d’avancer. » Je lui ai dit : « Mais au contraire. Parce que cet environnement réglementaire, vous l’avez, vous devez l’assumer. Nous, ce qu’on fait, notre métier, c’est de vous simplifier la gestion de ce réglementaire, et c’est justement d’assurer vos arrières et de vous permettre d’avancer de manière sereine. » Donc, on parle de données de santé. »
Caractérisique de la donnée de santé
DP : « Dans la gestion de la big data, qu’est-ce qui caractérise la donnée de santé par rapport aux autres types de données qu’on peut être amené à gérer ? »
PS : « C’est une donnée qui est extrêmement sensible. J’ai même entendu qu’elle était plus sensible que la donnée militaire. Elle bénéficie des standards de protection, de sécurité les plus élevés, que ce soit en termes d’hébergement, en termes de processus, en termes d’outils de gestion. Elle ne doit pas fuiter, tout simplement.
Aujourd’hui, tu parles big data, mais si on fait le lien, un petit écart avec l’intelligence artificielle, on a beaucoup d’outils qui se montent et qui travaillent sur des données anonymisées. Une donnée anonymisée par définition, l’anonymisation n’est pas réversible. Sauf qu’avec des moteurs d’IA un petit peu poussés, à partir du moment où je dis : « c’est un homme d’une quarantaine d’années, de type caucasien, qui est médecin, qui vit à Montpellier, etc., je vais arriver à définir que c’est Damien en face de moi. »
Il faut être extrêmement prudent avec ça. Parce que si je me rends compte que la personne pour laquelle je suis en train de reconstituer l’identité, a participé à un essai clinique sur le diabète, par exemple, il y a une forte suspicion que cette personne soit diabétique. Et en l’occurrence, elle n’a pas forcément envie de partager cette information, ce qu’on comprend. Parce qu’elle n’a pas envie de le partager au public, à ses enfants, à son assureur. Il y a des choses comme ça qui doivent rester confidentielles. Il faut être extrêmement prudent sur la manière dont on va travailler la donnée et avoir bien conscience des impacts structurels des choix qu’on fait. »